La vieillesse est comme le malvoisie…
J'ai 82 ans ! Si je vous dis mon âge, c'est qu'il correspond au titre prévu initialement pour la conférence: VIEILLIR : CHANCE OU FATALITE ! Moi je rajouterai : BENEDICTION !
Je dédie cette méditation à mon mari qui m'a quittée la Veille de Noël 1994 à l'âge de 91 ans.
Quelques semaines (ou mois) avant son départ, il était triste et surtout anxieux parce que, croyait-il, inutile. C'est vrai, il avait été très actif, toute sa vie, s'inquiétant pour les autres ... et maintenant il était dans un EMS, presque toujours étendu, immobile ou dans un fauteuil roulant..
Alors, je lui ai lu le Psaume 1 dans lequel il est question d'un arbre planté près de l'eau, qui donne son fruit en sa saison
(le lire éventuellement)
« Oui, dit-il, c’est bien, mais quel fruit est-ce que je peux donner là dans un EMS, installé dans un fauteuil ? »
Et, j'ai pu lui montrer tous les fruits qu'il portait encore. Je lui ai demandé :
- Dis-moi, pourquoi la directrice de l'établissement , ou la secrétaire, la cuisinière, les infirmières, les aides-soignantes viennent-elles avec un tel plaisir dans ta chambre ? Pourquoi te font-elles part de leurs fardeaux, de leurs soucis, de leurs difficultés financières ? Pourquoi te parlent-elles des patients au caractère ombrageux ? Elles viennent vers toi parce que tu ne plains jamais, parce que tu as de l’humour, parce que tu sais les taquiner et les faire rire ! Après un moment passé près de toi, elles repartent le cœur léger.
Je lui ai fait une grappe de tous les fruits qu’il portait et je lui ai dit :
- Tu te souviens du fameux vin valaisan, le malvoisie ce raisin récolté très tard, en novembre, en décembre même, un peu flétri, dans lequel il ne reste vraiment que l'essence du fruit. C’est un nectar rare, précieux et très cher. Tu te souviens comme il était bon ce vin ? Ces grappes-là portent le fruit de l’arrière saison, le dernier fruit qui fera le meilleur vin. Il est très titré en alcool, très concentré… il suffit de quelques gorgées pour réjouir le palais et faire sourire la tristesse...
Toi, c’est pareil, tu donnes ton fruit, ton meilleur fruit, le fruit de l’arrière-saison ! »
Il a souri, il avait compris, il était réconforté !
Nous aussi, nous nous demandons si nous portons du fruit ou à quoi nous servons. Ne laissons pas nos cœurs se dessécher, restons au bord du ruisseau qui donne l’eau vive, la parole de Dieu. Quelques gouttes de cette eau suffisent à redonner vie, à redonner espoir, confiance, amour.